jeudi 9 août 2018

GENESE 33


V 1 à 16 : rencontre avec Esaü

Après son combat décisif contre l’Eternel d’où il sortit blessé, Jacob vit arriver face à lui Esaü accompagné, comme il le lui avait été dit, de 400 hommes. De manière évidente, face à la démonstration de puissance dont Esaü faisait preuve ici, Jacob n’en menait pas large. Le moment de vérité était venu pour lui. Jacob, qui avait fui la haine qu’il avait suscitée chez son frère par ses tromperies, devait maintenant faire face à son passé. Après ces 20 années de séparation, quel sentiment dominait le cœur d’Esaü à son encontre ? La rancœur, l’amertume rongeaient-elles encore son cœur ? Ou la grâce de Dieu lui avait-elle enseigné à faire grâce à son frère ?

Il y a dans la vie ce qui se passe entre Dieu et nous et ce à quoi nous devons faire face dans les faits. Ce qui se passe entre Dieu et nous fait partie du domaine de l’intime, de l’intérieur. La foi, c’est considérer ce que nous savons de Dieu et ce que nous vivons avec Lui comme étant la réalité objective. C’est aussi, par conséquent, regarder ce que nous devons affronter dans les faits du présent comme subordonné à la révélation. Parce que nous sommes faibles et charnels, il arrive souvent que notre façon d’appréhender la réalité soit l’inverse de ce que la foi nous dicte. Nous regardons avec nos yeux de chair les difficultés qui se dressent devant nous, au lieu, comme David face à Goliath, de les regarder sous le prisme de la réalité de Dieu : 1 Samuel 17,45-46. Si nous sommes dans ce cas, rappelons-nous que ce n’est pas à nous de remporter la victoire. Celle-ci l’a déjà été par notre Chef, Jésus-Christ. Aussi pouvons-nous Le suivre et, avec Lui, mettre en déroute nos ennemis.

Jacob n’eut pas longtemps à attendre pour recevoir la réponse à ses questions. Tel le père voyant le fils prodigue revenir : Luc 15,20, Esaü, dès qu’il vit Jacob, courut à sa rencontre pour le serrer dans ses bras, et l’embrasser. Les deux frères fondirent en larmes dans les bras l’un de l’autre. Esaü fit connaissance avec les femmes et les enfants de Jacob et l’interrogea sur ce que signifiait les troupes qui l’avaient devancé. Jacob lui expliqua que celles-ci étaient porteuses de présents qu’il lui destinait. Les cadeaux de Jacob avaient comme intention de lui faire trouver grâce aux yeux de son frère. Esaü les refusa. Il n’en avait pas besoin, lui-même étant comblé de biens. Face à l’insistance de Jacob, il dut se résoudre à les accepter. La démarche de Jacob auprès d’Esaü porte bien encore ici la marque de l’homme qu’il a toujours été. Pour sa défense, il faut se rappeler qu’il l’a mise en œuvre avant sa rencontre avec Dieu. Trop souvent cependant, malgré le fait que l’on sait que c’est de la grâce de Dieu seule que nous devons attendre notre salut et notre acceptation, nous nous comportons comme Jacob. La grâce est suffisante, disons-nous… mais au cas où elle ne le serait pas, prenons nos précautions. Une telle attitude est une offense à Dieu, un déni de notre foi. Que Dieu nous donne de nous appuyer sans autre recours sur Lui !

Tout à sa joie de revoir son frère jumeau, Esaü lui propose de l’accompagner jusqu’à son territoire. Jacob se trouve de nouveau ici devant un dilemme. Certes, la rencontre avec son frère s’est bien passée. Mais l’euphorie des premiers moments ne risque-t-elle pas de s’évanouir et les vieilles rancunes ressurgir ? Jacob préfère prendre ses précautions. Prétextant la faiblesse de son petit bétail déjà bien fatigué des kilomètres parcourus, il supplie son frère de passer devant lui et de le laisser marcher à son rythme jusqu’à son arrivée à la montagne de Séir. Esaü a-t-il compris le sens de ses réserves ? En tant que frère, il ne pouvait pas faire moins pour Jacob, à cause des convenances, que ce qu’il lui avait proposé. Quoi qu’il en soit, il ne chercha pas à discuter avec Jacob. Les retrouvailles étaient faites, et peut-être valait-il mieux en rester là. Comme sous-entendu, Jacob ne se rendra jamais à Séir, mais ira s’installer à Sichem.

V 17 à 20 : installation à Sichem

Jacob arrivé dans le pays de Canaan, son installation se fit en deux étapes. D’abord, le patriarche s’arrêta à Soukkoth où il bâtit pour lui une maison et des huttes pour ses troupeaux. C’est à ce fait que l’on doit le nom de la ville. Puis, pour des raisons qui nous sont inconnues, Jacob leva le camp pour se rendre à Sichem, la ville où son grand-père Abraham a séjourné. Là, il acquit des fils de Hamor, le « seigneur » local, la parcelle de terre où il avait dressé sa tente. Aussitôt, il y érigea, en guise de témoignage, un autel en l’honneur de l’Eternel, le Dieu d’Israël. C’est ici, pour la première fois, qu’apparaît dans l’histoire le nom du peuple à qui le pays appartiendra des centaines d’années plus tard, sous la conduite de Josué. L’autel exprime le premier pas dans la prise de territoire spirituelle de Dieu sur Canaan. Ce petit commencement paraît insignifiant, mais il est le signal pour les dieux du pays de leur défaite et de l’ambition de Dieu. Il est pour le monde ce que la croix historique de Jésus-Christ représente : la prise de possession du monde par Jésus-Christ !

lundi 6 août 2018

GENESE 32


V 1 à 3 : rencontre avec les anges de Dieu

La paix conclue entre lui et Jacob, Laban, après une nuit de repos, se leva de bon matin pour se mettre en route vers sa maison. Tous les griefs du passé mis de côté, il put partir le cœur léger après avoir béni et embrassé ses fils (ses petits-fils) et ses filles. Ici se conclut pour Jacob cette étape de sa vie beaucoup plus longue que ne l’avait envisagé Rébecca, sa mère, au début : Genèse 27,44. Rébecca qui, entre temps est décédée, comme Jacob, auront appris ici une chose. C’est que dans la vie des élus de Dieu, ce n’est pas l’homme qui décide de ce qu’il va vivre, mais Dieu. Dans les plans que nous faisons, ce sont toujours nos intérêts qui sont nos mobiles. Dieu, quant à Lui, poursuit Son projet avec nous. Et le cœur de ce projet n’est pas la satisfaction de notre moi, mais la réalisation de Son dessein à travers nous. Ne nous étonnons donc pas si, sur le moment, les choses se passent mal pour nous ou différemment que ce que nous avions pensé. Le temps et les intentions de Dieu ne sont pas les nôtres. Il a la capacité d’arriver à Ses fins avec nous et, pour cela, ne manifeste aucune pitié pour notre moi. A la fin cependant, nous ferons l’expérience que le projet de Dieu pour nous était meilleur que le nôtre. Tout ce que nous vivrons finira par concourir au bien de ceux qui aiment Dieu et qui sont appelés selon Son dessein.

Jacob entrant dans une nouvelle étape de sa vie, celle-ci est inaugurée pour lui, comme la précédente, par une rencontre avec les anges de Dieu. Aucune parole ne nous est rapportée ici de ce moment. Aucune n’est peut-être nécessaire. La présence des anges suffit à Jacob pour lui rappeler le message que Dieu lui avait donné lors de son départ. La venue des anges à ce moment est en quelque sorte préventive. Jacob ne le sait pas encore, mais il va de nouveau au-devant de grandes frayeurs et épreuves. Dieu fait précéder ce moment pour lui d’un message : quoi que ce soit auquel Jacob devra faire face, Dieu l’assure de Sa protection. Ses anges en sont les témoins. Que Dieu nous donne la même paix et la même assurance en Lui !

V 4 à 22 : Jacob se prépare à rencontrer Esaü

De retour dans son pays, Jacob sait que les tensions qu’il a fuies avec son frère Esaü en le quittant ne sont pas résolues. Le temps a beau passé, il ne change pas l’état des choses. Aussi grande soit la distance que nous mettons entre nous et les problèmes que nous devons résoudre, aussi long soit le temps qui s’est passé depuis, il nous faut, lorsque nous retrouvons les personnes concernées, reprendre les choses là où nous les avons laissées. Ne pouvant éviter de rencontrer son frère, Jacob prend l’initiative d’envoyer auprès de lui des émissaires pour lui faire part de son retour au pays. Son espoir, dit-il, après toutes ces années d’éloignement est que, malgré le passé, il puisse trouver grâce à ses yeux.

Le retour qu’il reçut à son message ne le rassura pas, bien au contraire. Rien pourtant dans ce qu’il entendit ne portait en lui-même une note d’inquiétude. Jacob apprit qu’Esaü, le sachant de retour, venait lui-même vers lui avec 400 hommes. Dans quelle intention ? Etait-ce pour se venger de lui ou l’accueillir en frère ? Les émissaires ne pouvaient le préciser. Pour sa part, Jacob imagina le pire scénario. Aussi prit-il immédiatement de multiples initiatives dans le but de désamorcer la colère supposée de son frère et tenter de l’apaiser. Croyant, Jacob se tourna également vers son Dieu dans la supplication, Lui rappelant Ses promesses et Lui soumettant ses plans pour tenter de gagner son frère à la paix.

L’attitude de Jacob est pleine d’enseignements pour nous. Le premier est qu’il n’y a rien de plus terrible que de se laisser subjuguer par ce que l’on imagine. Une fois pour toutes, il faut que nous l’apprenions : ce que nous suggère notre imagination ne correspond pas à la vérité. L’imagination est, dans son rôle destructeur, au service unique de nos peurs. Or, nos peurs résultent d’une seule chose : du fait de laisser nos impressions subjectives sur une situation prendre le pas sur notre confiance en Dieu. « La peur, dit James Packer, est dangereuse à cause des conséquences qu’elle peut avoir sur la communion du chrétien avec son Dieu, en ce sens qu’elle peut submerger en même temps la raison et la foi et anéantir la santé mentale et le salut. Cette peur, tous les chrétiens de notre époque (qui n’est pas très différente à cet égard de celle de Paul), et spécialement les chrétiens dotés d’une imagination très vive, la connaissent à des degrés divers… Mais Paul nous exhorte à lutter contre cette peur, qui n’est rien d’autre qu’un épouvantail, puisqu’elle ne repose sur rien de concret.[1] »

Jacob ayant reçu, de la part de Dieu, la promesse qu’Il serait avec Lui et, de surcroit, la visite des anges avant de rencontrer Esaü, avait devant lui suffisamment de garantie de Sa part pour savoir que les choses se passeraient bien. Malgré tout, la peur fut la plus forte. Le second enseignement que nous recevons ici est que la peur nous empêche de rester tranquille, en repos. La peur nous pousse à l’activisme, aux initiatives humaines qui ont pour but unique de l’exorciser. Toutes ces initiatives sont cependant stériles. Elles ne nous donnent jamais la garantie que ce que nous avons mis en œuvre va réussir. Seul le fait de se cacher en Dieu et de compter sur Sa protection promise peut nous faire entrer dans le repos. Il nous faut le savoir : seule la parole de Dieu possède le pouvoir de la vérité objective. Tout ce qui se passe en nous, sentiments, pensées, scénarios conçus par l’imagination, tout ce qui est subjectif est trompeur et frappé du sceau du mensonge. C’est par la foi en la Parole de Dieu que l’homme triomphe de ses peurs et de tout ce que son âme, facilement impressionnable, voudrait lui faire croire. Que Dieu m’aide à vivre de Sa vérité aujourd’hui !

V 23 à 33 : Jacob lutte avec Dieu

Alors qu’il fait tout son possible pour désamorcer la colère supposée d’Esaü contre lui avant de le rencontrer, Jacob, resté seul près du gué de Yabboq, livre un dernier combat. Quelqu’un qui a l’apparence d’un homme se dresse contre lui dans un but unique : se battre contre lui. La raison pour laquelle cet homme se comporte de la sorte avec Jacob ne nous est pas précisée. Tout ce que l’on sait est que le combat est âpre, acharné, qu’il dure, ce qui signifie que, pendant longtemps, on ne sait qui va l’emporter de Jacob ou de son adversaire. A bout de ressource, l’homme finira par porter à Jacob un coup fatal au tendon de la cuisse. Pour autant, Jacob ne lâchera pas prise. Il ne lâchera son adversaire qu’après lui avoir soutiré une bénédiction. L’homme se rendra à la demande de Jacob. La bénédiction qu’Il lui donnera se traduira pour lui par un changement de nom. Désormais, Jacob ne sera plus Jacob, mais Israël, celui qui se bat victorieusement avec Dieu et avec les hommes. Jacob questionna pour finir son adversaire sur son identité. Mais, bien qu’elle soit évidente au vu du nouveau nom qu’il a reçu, celui-ci refusera de la lui donner. De cette bataille, Jacob sortira différent sur deux plans. Sur le plan spirituel, il aura appris une fois pour toutes que c’est de Dieu que vient la bénédiction sur sa vie. La bataille avait ce but. Sur le plan physique, Jacob restera blessé à jamais. L’articulation de sa hanche démise, un des muscles porteurs du corps, il marchera désormais en boîtant, et non plus aussi à l’aise qu’auparavant.

Qu’il est âpre et difficile aussi dans nos vies le combat qui consiste pour Dieu à nous subjuguer, nous briser et détruire notre force naturelle. Pour se faire, Dieu sait où nous frapper. Il sait quelle partie de notre être. Il doit démettre pour que, constamment, nous nous rappelions que c’est de Lui que nous devons tirer notre force. Pour notre bien spirituel suprême, il n’est pas de l’intention de Dieu que notre marche avec Lui s’appuie sur nos forces naturelles. Si quelqu’un est à l’aise pour marcher avec Dieu sur la base de ses forces naturelles, c’est qu’il n’a pas encore vécu le brisement. Par le brisement, Dieu nous rend faible, fragile, boiteux. De cette manière, chaque jour de notre vie, par la douleur, nous apprenons que c’est de Lui, par Lui et pour Lui que nous devons vivre et non de nous, par nous et pour nous. « Souvenez-vous de Jacob et de sa crise de minuit, dit un auteur, quand Dieu prononça une sentence de mort sur la force du vieux-Jacob. Même lorsqu’il en sortit avec son nouveau nom, Israël, Dieu jugea bon qu’il fût marqué et devint boîteux. Ce devait être pour lui un rappel constant qu’il ne devait plus marcher selon la vieille vie de la chair, mais dans la force de sa nouvelle vie : Israël. Ainsi c’est en tant qu’hommes nouveaux en Christ que nous apprenons comme nous sommes faibles en nous-mêmes, mais que notre constante source de force est en Lui.[2] »

Le combat engagé, notons que les deux parties d’une certaine manière y gagnent. Par le brisement, Dieu l’emporte sur Jacob. Il parvient à Ses fins. Jacob devra renoncer à la tromperie, aux magouilles et à sa malice et compter désormais sur Dieu. Dieu va le faire entrer dans le style de vie qui convient à un élu et qu’Il veut pour lui. Jacob sera béni, ce qu’il a toujours cherché à être par ses propres moyens, depuis le jour où il a volé son droit d’aînesse à Esaü, son frère aîné. Que ta bénédiction, ô Dieu, repose aussi sur moi que Tu as brisé !



[1] James Packer : Connaître Dieu
[2] Devern Fronke : la suprême intention

jeudi 2 août 2018

GENESE 31


V 1 à 21 : Jacob s’enfuit de chez Laban

Alors qu’il quittait seul son pays vers l’inconnu, Jacob reçut la garantie de Dieu que Lui ne le laisserait pas : Genèse 28,15. Des décennies plus tard, Jacob ne peut que le constater : Dieu a tenu Sa Parole. La bénédiction de Dieu a fait que, venu les mains vides, Jacob s’est considérablement enrichi. Cette bénédiction de Dieu sur Jacob ne lui a pas seulement profité. Elle s’est largement étendue sur la maison de Laban. Petit à petit cependant, elle est devenue une source de tensions entre les deux maisons. Si Laban a été béni, c’est à cause de Jacob. Rien ne le montre avec autant d’évidence qu’au moment où celui-ci demande à Laban de lui fixer son salaire. Les critères fixés, Dieu va agir de telle manière que Jacob soit en toutes situations le gagnant. Que Laban décide que les brebis rayées soient ce qui revient à Jacob, et toutes les brebis naissent comme telles. Qu’il décide que ce soit celles qui sont tachetées, il en est de même.

Jacob est le neveu de Laban, son gendre et son serviteur. Mais il est d’abord et avant tout l’élu de Dieu. Cette caractéristique n’est pas secondaire. Elle prévaut sur toutes les autres. Aussi souverain soit-il sur sa maison, Laban doit l’apprendre. Il n’est pas libre de se jouer de Jacob comme il le veut. En s’en prenant à Jacob, c’est à Dieu, en dernier ressort, qu’il a à faire. Il y a avec Jacob une main puissante contre laquelle Laban ne peut pas lutter. Cette évidence, qui a pu réjouir pour un temps Laban et ses fils, est devenue avec le temps de plus en plus pesante. La bénédiction de Dieu qui les a enrichis au travers de Jacob est devenue source d’irritation et de jalousie. Désormais, on ne se réjouit plus de la présence de Jacob dans la maison. La bénédiction de Dieu l’a rendu trop fort, si fort qu’à côté de lui, la fortune de Laban fait pâle figure.

Jacob n’est pas aveugle. Il sent bien que le vent tourne. Les visages de Laban et de ses fils n’affichent plus à son contact le sourire du passé. Les paroles qu’on s’échange ne portent plus la marque de l’accueil et de la bienveillance du début. Dieu ne va pas laisser à Jacob le soin de décider de ce qu’il doit faire. Après des décennies de silence, Il se révèle de nouveau à son élu. C’est sur une parole de Dieu que Jacob s’appuya pour venir chez Laban. C’est fondé sur une autre parole de Dieu qu’il prendra la décision de le quitter. La parole de Dieu qui nous fait entrer dans une situation est aussi celle qui doit nous en faire sortir. Comme Jacob, l’élu de Dieu doit apprendre que, même si les choses durent, il n’est pas lié pour toujours aux personnes avec lesquelles Dieu l’a mêlé pour un temps. L’élu de Dieu sert le projet de Dieu, non celui des hommes. Le projet de Dieu reste souverain sur sa vie. Quand la bénédiction de Dieu sur sa vie devient un problème pour son entourage, c’est celui-ci que l’élu de Dieu doit quitter. Il y a là d’ailleurs souvent un indice assez fiable que c’est pour lui le moment de partir. Comment doit-il s’y prendre ? la suite montre comment Jacob l’a fait.

La première chose que fit Jacob fut d’informer Léa et Rachel, ses deux femmes, de ce qu’il constatait. Le rapport que leur fit Jacob ne touchait pas seulement au changement de climat qu’il avait perçu dans les propos des fils de Laban ou dans la manière d’être de celui-ci à son égard. Il témoignait aussi de la façon avec laquelle Dieu avait agi en sa faveur pour déjouer les manigances de leur père en vue de le spolier du salaire de son travail chez lui. Si Jacob avait demandé à ses deux femmes, filles de Laban, de le suivre sans autre appui que celui de sa propre volonté, nul doute qu’il aurait pu se heurter à un refus ou une résistance de leur part. En témoignant de ce que Dieu avait fait, Jacob déplace le débat. Il ne s’agit pas ici d’un choix à faire sur la base de sentiments ou de liens affectifs humains, mais d’une décision à prendre au regard de la conscience. L’autorité face à laquelle Jacob demande à ses femmes de se placer n’est pas la sienne, ni celle de Laban, leur père, mais celle de Dieu qui a clairement indiqué à quel parti Il se rattachait. Les deux femmes de Jacob n’hésitèrent pas. Se sentant étrangères avec Jacob dans leur propre maison, elles donnèrent à Jacob le quitus qu’il attendait pour partir. La minute suivante, toute la maison rassembla ses biens et ses troupeaux et se mit en route vers la région montagneuse de Galaad. Deux ombres apparaissent au tableau de ce départ. La première est que Jacob quitta Laban sans le prévenir. Il s’enfuit de chez celui chez qui il avait vécu des décennies, avec ses deux filles, comme un voleur. La seconde est que Rachel, à l’insu de Jacob, déroba à son père ses faux dieux. Ce péché témoigne contre elle de la faible connaissance qu’elle avait du Dieu de son mari et ajoute inutilement de la tension à la situation.

Retenons les leçons que nous donne ici l’Ecriture. La première est que, sans le témoignage explicite de la direction de Dieu, mieux vaut nous abstenir de prendre une décision qui oriente de façon majeure notre vie. La seconde est que, même si nous avons le témoignage de Dieu pour nous, la façon avec laquelle nous agissons en vue d’obéir à Dieu n’est pas sans importance. La précipitation n’est jamais bonne conseillère. L’important n’est pas seulement que nous soyons approuvés de Dieu, mais encore des hommes dans notre façon d’agir. La troisième est que nous devons nous assurer que ceux que nous embarquons avec nous, nos proches, soient sur la même longueur d’ondes que nous sur le plan spirituel. Car c’est d’eux aussi que dépend le succès de notre entreprise.

V 22 à 42 : Laban rattrape Jacob

Ayant appris le départ précipité de Jacob, Laban ne resta pas passif. Accompagné de ses frères, il partit à sa poursuite dans le but évident de lui faire rendre compte de sa manière d’agir. Mais Dieu, qui était à l’origine de l’exil de Jacob et qui l’avait assuré qu’Il serait avec lui jusqu’à ce qu’il revienne dans son pays, veilla sur lui. Il se révéla de nuit à Laban pour lui donner l’ordre formel de ne pas toucher à son serviteur. Jamais, à aucun moment, les élus de Dieu ne sont livrés à eux-mêmes ou au pouvoir de ceux qui voudraient ou pourraient leur faire du mal. Les élus de Dieu sont Sa propriété. Leurs vies, leur parcours, aussi chaotique puissent-ils paraître, sont ordonnés, agencés par Sa souveraineté. Aussi ne se produit-il dans leurs vies que ce que Dieu permet. Pour se faire, la main agissante de Dieu (les élus doivent le savoir) ne se limite pas à ce qu’ils peuvent en voir. Elle agit pour eux dans le cœur et la conscience de leurs adversaires qu’elle incline à agir selon Sa volonté et Sa bienveillance en leur faveur.

Laban ayant rejoint Jacob au bout de sept jours, l’heure est venue d’une franche explication entre eux. Laban commence à faire part à son gendre de son indignation. Pourquoi, après 20 années de cohabitation, Jacob a-t-il agi de la sorte, contre toutes les convenances envers celui qui est son beau-père, le père de ses deux épouses ? Pourquoi s’enfuit-il ainsi comme un voleur sans que ne soit donné à Laban l’occasion de célébrer son départ et celui de ses filles par une fête ? Pourquoi surtout s’est-il enfui en volant les dieux domestiques de Laban, chose de laquelle Jacob ne savait rien jusque-là ? Oui, si ce n’était la voix de Dieu qui le lui avait interdit, Laban, avec ses frères, pourrait user de la force pour châtier Jacob de sa folie. Que Jacob s’explique !

Jacob va le faire en deux temps. S’il est parti, dit-il, c’est parce que, au vu du climat dégradé de leur relation, celui-ci avait peur que Laban l’empêche de quitter Canaan avec ses deux filles. Laban, en effet, avait suffisamment donné la preuve tout au long des années partagées avec son gendre, qu’il ne lâcherait rien pour lui volontairement. Jacob en avait conclu que, s’il voulait conserver quelque chose de toute la richesse acquise lors de son séjour, y compris ses femmes, le mieux était de partir sans rien dire. Pour l’heure cependant, Jacob a une affaire plus urgente à régler. Tenant à ce que cette histoire de vol qu’il ignorait jusque là soit réglée, il presse Laban de mener son enquête et d’agir. En guise de gage de sa sincérité, il promet, si c’est le cas, que celui chez qui les objets dérobés se trouveront le paiera de sa vie !
Visitant chaque tente, en commençant par celle de Jacob, puis des deux servantes et de Léa, Laban ne trouva rien. Voleuse, Rachel, sentant son heure venir, se fit menteuse. Prétextant avoir ses règles, elle demanda à Laban de l’excuser pour le fait de ne pas se lever devant son père. Elle resta ainsi assise sur le bât de son chameau sous lequel elle avait caché son larcin.

La recherche de Laban ne donnant rien, Jacob fit part à son beau-père de sa vérité sur son vécu auprès de lui. Oui, la bénédiction de Dieu l’avait enrichi pendant son séjour chez lui, mais à quel prix ! Que Laban le reconnaisse ! Durant les 20 années au cours desquelles Jacob a servi chez lui, il ne lui aura fait aucun cadeau. Jacob a largement payé par son travail, sa fatigue, son engagement ce qu’il a acquis. Ce n’est pas comme un membre de la famille qu’il a vécu chez Laban, mais comme un esclave ! Son beau-père n’ira-t-il pas jusqu’à lui demander de lui rembourser les brebis que les voleurs lui prenaient alors qu’il était berger de ses troupeaux ? Laban et ses frères peuvent avoir leur propre jugement sur lui ! Mais ici, c’est l’Eternel qui rend son arbitrage entre Jacob et son beau-père. Et, la nuit précédente par la visite qu’Il a fait à Laban, Il a tranché. Le droit et la justice ne sont pas du côté de Laban, mais de Jacob.

Quel bonheur pour l’élu de Dieu, victime d’injustice, de savoir que Dieu, le Dieu qu’Il sert est Son défenseur et Son avocat. L’élu de Dieu peut longtemps souffrir d’exactions. A la fin, sa justice, son intégrité et son innocence devront être reconnus par tous. Que le Dieu de toute justice soit aussi le Dieu de ma justice !

V 43 à 54 : Jacob et Laban concluent une alliance en Galaad

Face à la défense de Jacob, Laban ne fait preuve ni de regrets, ni d’humilité. Tout ce que Jacob prétend sien n’est pas à lui, mais lui appartient, ses filles, leurs enfants comme les troupeaux. Laban réagit par un complet déni au témoignage rendu par Jacob sur son vécu chez lui pendant les 20 années où il a séjourné dans sa maison. Sa réponse témoigne de l’esprit qui fut le sien pendant tout ce séjour. Bien que son parent, Jacob n’était qu’un serviteur dont le travail ne servait qu’un but : enrichir son maître. Tout était à sens unique dans la relation que Laban entretenait avec Jacob. Il n’y avait de sa part ni grâce, ni volonté de partage. Laban est l’image contraire de Dieu, un Dieu qui n’asservit pas, mais qui donne, un Dieu qui ne nous considère pas comme Ses esclaves, mais comme des fils qu’Il fait héritiers de tous Ses biens.

Ayant dit ce qu’il avait à dire, Laban est aux limites de ce qu’il peut faire. Jacob, il le sait, ne lui appartient pas. Il n’a aucun droit de le retenir indéfiniment auprès de lui. L’heure n’est plus à l’amertume et aux griefs, mais à la sagesse. Le passé ne peut pas être refait, mais l’avenir peut être préparé ensemble pour que la paix existe. Laban propose donc à Jacob de conclure en des termes précis une alliance entre eux. Cette alliance devra engager chacune des parties devant Dieu à des obligations. C’est à Jacob qui part qu’en revient cependant la part la plus grande. Préoccupé par les intérêts de sa famille qu’il ne verra plus, Laban impose à Jacob de prendre soin de ses filles en s’engageant à ne prendre plus d’autres femmes qu’elles. Sur le tas de pierre qu’il éleva en guise de frontière et de témoin entre eux, Laban demanda ensuite à Jacob de s’engager à ne jamais le dépasser en vue de lui faire du mal. L’alliance fut conclue entre Jacob et Laban devant Dieu et concrétisée par un repas de communion.

Par la grâce de Dieu, malgré toutes les blessures et les reproches mutuels, tout put bien se terminer entre Laban et Jacob. C’est aussi ce que Dieu veut pour la communauté fraternelle. Il n’est pas possible de réparer le passé. Une fois la vérité de chacun dite, il est possible de faire en sorte que l’avenir des relations soit paisible. Que Dieu nous donne la grâce d’y parvenir !

vendredi 6 juillet 2018

GENESE 30


V 1 à 8 : les enfants de Bilha

La bénédiction évidente de Dieu sur Léa, la mal-aimée, ne put à terme laisser Rachel de marbre. Certes, elle était la préférée de Jacob. Mais à quoi cela lui servait-elle alors qu’autour d’elle tous les fils de Jacob qu’elle voyait remplir la maisonnée étaient de sa sœur ? Si la faveur des hommes peut un moment réjouir le cœur, rien ne surpasse celle de Dieu. Jalouse de Léa, Rachel s’en prit à Jacob comme si le changement qu’elle espérait pour elle dépendait de lui. Jacob renvoya Rachel à juste raison vers Dieu. Car, que nous le voyions ou non, chacune de nos difficultés, chacune de nos limites, chacune de nos épreuves ont leur cause en Lui. N’est-ce pas de Lui, dit Jérémie, que viennent les maux et les biens : Lamentations 3,38 ?

Oui, comme il en est ici pour Rachel et Jacob, nos vrais combats nous opposent toujours à Dieu. Les éléments humains ou naturels ne sont pas absents de nos luttes, comme c’est le cas ici. Mais ils ne sont pas la vraie cause du problème. Ils ne sont que des causes secondes, mais la cause première se trouve en Dieu. Notre combat est celui de notre volonté contre la sienne. Ce combat est si âpre que, comme le dit ici Rachel, nous avons l’impression que, s’il n’est pas surmonté, nous allons mourir. C’est que, si Dieu est plein de grâce et de compassion envers nous pour nous pardonner, Il est aussi celui qui est Seigneur et qui ne fléchit pas lorsqu’Il s’agit pour Lui d’atteindre le but qu’Il s’est proposé pour nous. Dieu a promis dès le départ d’être avec Jacob, de le bénir et de le garder dans tout ce qu’il va vivre. La bénédiction de Dieu pour autant ne signifie pas que Dieu va donner à Jacob la réussite et une vie agréable en comblant tous ses désirs. La bénédiction de Dieu signifie que la main de Dieu qui le garde ne le lâchera pas tant que le dessein qu’Il a pour lui et en lui ne se réalise. L’histoire qui commençait bien pour lui tourne de plus en plus au vinaigre. En apparence, sur le plan humain, on pourrait penser que Jacob a eu avec les deux filles de Laban une double bénédiction. Elles seront pour lui comme une double écharde dans sa chair.

Pour l’heure, bien que Jacob ait orienté le regard de Rachel vers Dieu, celle-ci ne le conçoit pas ainsi. Rachel ne prie pas, n’implore pas Dieu, ne fait pas appel à Sa grâce. Elle fait ce que Sara, son aïeule, a fait en son temps dans la même situation. Elle propose à son mari d’agir selon les us et coutumes locales qui permettent, au cas où l’épouse officielle ne peut avoir d’enfants, d’enfanter au travers de sa servante. C’est ainsi que Bilha est donné à Jacob. Le stratagème réussit puisque, à deux reprises celle-ci donne à Jacob un fils. Elle nomme le premier Dan, qui signifie Juge, nom qui exprime le sentiment de Rachel que Dieu lui a enfin fait justice face à sa sœur. Le nom que Rachel donne au fils de Bilha n’est révélateur que d’une seule chose : de la jalousie et de la frustration profonde qu’elle entretient à l’égard de sa sœur. Non, Dieu ne lui a pas fait justice pour deux raisons au moins. La première est que Dieu ne se venge pas contre Lui-même d’une bénédiction qu’Il aurait donné à une autre personne. Une telle manière de penser ne fait que mettre en valeur la perversion du cœur. La seconde est que le fils qu’elle revendique comme le sien ne l’est en fait pas. Quoi qu’elle dise, ce que Rachel a eu n’est pas à la hauteur de ce que Léa a reçu de Dieu. Le nom donné au second fils, Nephtali (Combat), va en droite ligne de l’esprit dans lequel elle a agi lorsqu’elle a nommé le premier. Forte de ses deux fils, Rachel croit l’avoir remporté sur Léa, ce qui tend à nous faire penser que le récit que nous lisons se situe entre les deux naissances des premiers fils de Léa. Tout, entre les deux femmes, n’est que rivalité et concurrence. Bien que chef de famille, Jacob n’a plus la maîtrise des choses, mais devient le jouet de l’antagonisme qui règne entre ses deux épouses.

V 9 à 13 : les fils de Zilpa

Après Rachel, ce fut Léa qui eut recours au stratagème utilisé par sa sœur pour donner de nouveaux fils à Jacob. Ne pouvant plus enfanter, elle donna à Jacob sa servante Zilpa qui lui donna deux nouveaux fils : Gad et Aser. Favorisée par Dieu, Léa ne se montre pas différente de Rachel lorsque le Seigneur semble lui retirer Sa grâce pour un temps. Pour elle aussi, tous les moyens sont bons pour gagner la compétition qui l’oppose à sa sœur et, quelque part, l’emporter sur elle dans le cœur de son mari. Ce n’est pas en vain, qu’inspiré de Dieu, Paul exhortera les philippiens à ne rien faire par rivalité ou vaine gloire : Philippiens 2,3. Rien n’est plus nocif à l’esprit de famille qui doit habiter le peuple de Dieu que cette concurrence née de la jalousie qui dresse les enfants de Dieu les uns contre les autres dans une compétition grotesque (le nom choisi par Léa pour ces deux nouveaux fils en témoigne).

Quelles que soient les motivations qui animent les acteurs du plan de Dieu, celles-ci n’empêchent pas pour autant le Seigneur d’accomplir Son dessein. Petit à petit, il naît de Jacob les fils qui seront les pères des tribus de la future nation. La souveraineté de Dieu dépasse largement la petitesse de l’homme. Certes, il lui faut corriger, parfois avec sévérité, ses serviteurs animés d’intentions charnelles. Mais tous leurs défauts n’ont pas le pouvoir d’annuler Son projet, de rendre caduque le dessein de Sa volonté. L’homme peut croire qu’il utilise Dieu en vue de Ses fins. Ce n’est jamais le cas. Lorsque l’homme retourne dans la poussière, le projet de Dieu poursuit sa route et témoigne du fait que, même dans sa folie, l’homme sert Dieu. Apprenons que le moment présent ne représente pas la vérité des choses. Seul le futur le fait et, mieux que lui encore, l’éternité. Alors que dans le présent nous ne voyons souvent que chaos, comportements humains, terrestres, charnels, nous contemplerons ébahis, à partir de ce point de vue final, l’œuvre magnifique et parfaite de Dieu. Comme Paul, le dit, nous ne pourrons alors ensemble ne faire qu’une seule chose : célébrer la gloire de la grâce de Dieu : Ephésiens 1,5-6.

V 14 à 21 : naissances d’Issacar et de Zabulon

Dans une compétition, toutes les occasions sont bonnes pour marquer des points et prendre le dessus, ne serait-ce que pour un temps, sur son adversaire. La compétition ne laisse jamais ceux qui y entrent dans la neutralité. Elle engendre un état d’esprit qui colore toute leur façon d’agir. Dans la compétition qui les oppose l’une à l’autre, Rachel et Léa ne sont plus sœurs. Elles sont rivales. Rien de ce qui fait leur relation n’est gratuit. Tout est calculé, pesé en vue de gagner sur l’autre. Le récit qui relate comment se produisit les naissances d’Issacar et de Zabulon par Léa en est le témoignage.

Dans une famille normale, les échanges entre membres sont spontanés. Parce que nous sommes membres du même corps, l’entraide, le soutien et le partage sont naturels. Personne ne pense que s’il fait du bien à son frère, c’est pour que celui-ci soit d’une façon ou d’une autre, son débiteur. Nous sommes une seule entité, un seul organisme et non des parties divisées qui cohabitent. La principale nuisance de la rivalité est de détruire l’unité que crée l’amour et le sentiment d’appartenance à un tout. Or, Jésus le dit, tout royaume divisé contre lui-même est dévasté, et toute ville ou maison divisée contre elle-même ne peut subsister : Matthieu 12,25. Il y a un vrai danger d’éclatement lorsque, à l’intérieur d’une même entité, la rivalité a remplacé la solidarité.

Alors qu’au début du récit, on sent que Dieu prend en main la cause de Léa, la mal-aimée, plus celui-ci avance, plus on constate que celle-ci est au moins autant que sa sœur dans la compétition. Profitant de l’occasion qui lui est offerte d’une demande de service de sa sœur, Léa la monnaye contre le droit, le soir même, de coucher avec Jacob. La tractation entre les deux sœurs suggère deux choses. La première est que, dans la compétition, il ne faut montrer aucun signe de faiblesse. Un signe de faiblesse, c’est le fait de demander un service à l’autre, de montrer que l’on aurait besoin de ce qu’il a. C’est entrer, même de façon minime, dans une forme de dépendance de l’autre. Une telle chose est mortelle. La seconde est que, semble-t-il, dans la vie quotidienne des deux sœurs, tout est pesé, organisé de manière à ce que, dans les faits, aucune ne soit lésé. Ainsi, si Léa achète le droit de coucher avec son mari ce soir-là, c’est que la prochaine fois où Jacob devait coucher avec l’une de ces femmes, c’était le tour de Rachel. Tenir à ce point-là un agenda détaillé du droit conjugal dépasse l’entendement. Une telle ineptie témoigne à la fois du degré de rivalité qui marquait les relations entre les sœurs et des complications pratiques qu’engendre la polygamie.

Le plus étrange dans tout cela, comme dit auparavant, est de voir Dieu poursuivre Son projet de construire une famille à Jacob au travers de cette rivalité grotesque. Deux fils s’ajoutent aux huit qu’il possède déjà. Paul, confronté à la rivalité d’adversaires qui cherchent à lui faire de la peine alors qu’il se trouve en prison, a su voir, par la foi et dans l’humilité, le bien que Dieu pouvait tirer pour Sa cause d’un tel mal. « Qu’importe ? De toute manière, que ce soit pour l’apparence, que ce soit sincèrement, Christ n’est pas moins annoncé : je m’en réjouis, et je m’en réjouirai encore : Philippiens 1,18. » Que Dieu nous donne, face à la mesquinerie humaine, la hauteur d’esprit de l’apôtre !

V 22 à 24 : Dieu se souvient de Rachel

Si l’Eternel, dans Sa grâce, a favorisé Léa, la mal-aimée, en lui donnant de nombreux fils et une fille, Dina, Il n’est pas pour autant un Dieu partisan. Dieu n’est pas avec Léa contre Rachel. Dieu est à la fois pour Léa et pour Rachel, se souciant autant du bonheur de l’une que de l’autre. Aussi, après avoir favorisé Léa, l’heure est venue pour Dieu de manifester Sa bonté envers Rachel. Ayant secouru Léa dans sa détresse, Il était juste que Dieu entende également les supplications que faisait monter vers Lui Rachel dans la sienne. Comme Léa a reçu ses fils comme un cadeau de la grâce de Dieu, Dieu a agi pour qu’il en soit de même pour Rachel. Il a enfermé les deux épouses rivales dans la détresse pour leur faire grâce l’une après l’autre, comme Il l’a fait pour les Juifs et les païens au sujet de leur désobéissance, par Jésus-Christ : Romains 11,32. Exaucée par Dieu, Rachel eut la joie de donner son premier fils à Jacob, Joseph. Avec lui, dit-elle, elle reçut plus qu’un enfant. C’est aussi tout le poids de la honte qu’elle portait depuis des années à cause de sa stérilité qui tomba de ses épaules. Avec ce premier fils, une porte d’espoir s’ouvrait aussi devant elle. Si Dieu, dans Sa grâce, lui donnait un fils, rien ne l’empêchait de lui en donner un second dans l’avenir. La grâce n’est pas juste une compensation, un lot de consolation. Elle est l’expression de la générosité de Dieu. Si nous en sommes l’objet, toutes les espérances sont possibles ! Dieu n’est-Il pas Celui qui peut faire pour nous infiniment au-delà de ce que nous pensons ou demandons : Ephésiens 3,20.

Que nous puissions ici apprendre de la pédagogie de Dieu ! Ses pensées ne sont pas nos pensées et Ses voies ne sont pas nos voies ! Apprenons aussi du fait que, jamais, dans aucune situation, Dieu ne se conduira comme un Dieu partisan. Dieu aime chacun de la même manière. Il attend seulement que nous soyons suffisamment affligés de ce que nous sommes pour nous faire grâce ! Apprenons aussi de la foi de Rachel, bénéficiaire de la grâce de Dieu. Oui ! Dieu reste souverain dans l’attribution de Ses dons. Mais Sa grâce n’est pas chiche. Elle est une porte d’espérance qui nourrit notre attente en vue de quelque chose d’encore et de toujours meilleur pour nous. Que Dieu me donne aujourd’hui de ne pas froisser cette disposition de cœur à la générosité qui est en Lui et qu’Il a démontré par le don de Son Fils éternel si précieux. Au regard de cette mesure, il n’y a rien que nous puissions demander qui surpasse ce don ! Lui, qui n’a pas épargné Son propre Fils, mais qui L’a livré pour nous tous, comment ne nous donnera-t-Il pas aussi tout avec lui, par grâce : Romains 8,32 ?

V 25 à 43 : Jacob s’enrichit chez Laban

Bien que le séjour de Jacob chez Laban se prolonge, celui-ci n’oublia pas que le but de son exil n’était pas qu’il reste indéfiniment loin de sa terre, mais qu’il y retourne. Rachel ayant donné un fils à Jacob, le patriarche le vit comme le signe divin du moment de son départ. Il en informa son beau-père lui faisant valoir tout ce qu’il avait investi comme force à son service depuis le jour de sa venue. Face à l’évidence, Laban ne trouva rien à redire à la demande de Jacob. De manière effective, la venue de Jacob avait considérablement amélioré la condition matérielle de Laban. Ses troupeaux s’étaient tant accrus que, cherchant une explication du phénomène, Laban avait appris par divination que la cause en était à la bénédiction divine qui reposait sur Jacob. Laban est ici le témoin que ce que Dieu avait promis à Jacob lors de Sa rencontre avec lui à Béthel était tenu : Genèse 28,15.

L’heure venue du départ de Jacob, Laban invite son gendre à fixer lui-même le salaire qu’il lui doit. Bien qu’il soit son beau-père et qu’il l’ait accueilli, Laban avait son honneur. Il ne voulait pas qu’il soit dit que Jacob l’ait servi pour rien, si ce n’est ses deux filles, si longtemps. Ce qui aurait pu se régler avec l’art et la manière selon la justice, tourna vite des deux côtés au marché de dupes. Jacob proposa que ce ne soit ni lui ni Laban qui décide mais, quelque part, Dieu. Il demanda ainsi qu’en ce jour Laban fasse lui-même la revue de ses troupeaux et qu’il mette à part pour Jacob toutes les bêtes tachetées et marquetées ou de couleur foncée parmi les moutons. La plupart du temps, en effet, les moutons étaient blancs, et les chèvres noires, si bien, qu’en apparence, le salaire que demandait Jacob était modeste. Laban signifia son accord à Jacob. Le même jour, il ordonna à ses fils de passer dans tous les troupeaux pour enlever les animaux concernés et les éloigner.

C’était sans compter à la fois sur Dieu et sur la ruse de Jacob. Car si le rusé se fait avoir une fois, il ne se le fera pas deux fois. Au contact de Laban, Jacob avait appris à connaître le personnage et à s’en méfier. Aussi sincère pouvait paraître la parole de Laban, il ne fallait pas s’y fier. Selon une superstition qui avait cours, Jacob mit en place un stratagème par lequel il pouvait influencer la couleur des brebis qui naitraient. Là encore, le procédé est tout humain. S’il n’y avait eu la main de Dieu pour le faire réussir, il aurait échoué. Mais Dieu veillait sur Son serviteur et, quoique Jacob ait manigancé, c’est non pas à sa ruse que Jacob devra de se constituer des troupeaux à part, mais à l’action souveraine de Dieu : Genèse 31,12. Le cheptel et la maisonnée de Jacob crut ainsi considérablement. Il était temps pour lui de rentrer au pays !

mardi 26 juin 2018

GENESE 29


V 1 à 14 : Jacob rencontre Rachel

Arrivé dans le pays où vivait sa famille, Jacob s’arrêta à un puits où les bergers venaient faire boire leurs troupeaux. Il s’informa auprès d’eux pour savoir s’ils connaissaient Laban, le fils de Nahor. Comme il en fut pour le serviteur d’Abraham venu chercher, des années auparavant, une épouse pour Isaac, c’est à ce moment précis qu’apparut Rachel, la fille de Laban, accompagnée de son troupeau. Alors qu’il était de coutume d’attendre que tous les troupeaux des bergers soient réunis pour ôter la pierre de dessus le puits, Jacob prit l’initiative de le faire pour faire boire le troupeau de sa cousine. En explication à son geste, Jacob se présenta à Rachel, déclinant son identité et le lien de parenté qui l’unissait à elle. Comme ce fut aussi le cas pour Rébecca devant le serviteur envoyé par Abraham, Rachel laissa sur place Jacob pour courir annoncer la nouvelle de la venue de son cousin à son père. Heureux de la nouvelle, Laban courut à la rencontre de son neveu et, dans toute la joie de faire sa connaissance, l’étreignit et l’embrassa. Jacob raconta à Laban tout ce qui touchait à son histoire et celle de sa famille, un témoignage qui confirma pour Laban que Jacob était bien celui qu’il prétendait être. C’est par le témoignage que des frères se reconnaissent.

Nous avons ici, le moins qu’on puisse dire, une histoire qui commence bien. Nous ne sommes ici cependant qu’au début des choses et de la longue période que Jacob va passer chez Laban. Il en est de ce début heureux comme il peut aussi en être de chaque début d’histoire dans lesquelles les relations entre les personnes vont être étroites et durables. Le début les fait voir sous leur meilleur jour. Petit à petit, cependant, chacun va apprendre à découvrir l’autre tel qu’il est, avec ses défauts, sa fourberie, son penchant à chercher ses intérêts en premier. La relation va se changer en un miroir dans lequel chacun, à la lumière du comportement de l’autre, va se révéler. C’est ici que les choses deviennent compliquées. Mais c’est ici aussi que Dieu agit pour travailler et façonner les cœurs. Il en est dans les relations humaines comme il en est aussi dans la relation avec Dieu. Le pardon nous Le fait connaître comme un Dieu miséricordieux, compatissant, plein de grâce à notre égard, ce qui est vrai. Mais avec le temps, nous allons découvrir que Dieu est aussi un Dieu saint, juste, impitoyable avec le péché, la chair. Et si nous voulons que la communion entre Lui et nous perdure et s’approfondisse, il nous faudra nous adapter à Lui, Le laisser travailler en nous pour qu’Il nous façonne à Sa ressemblance. Nous aurons beaucoup à souffrir sous la main de Dieu. Mais le but de Dieu n’est pas que nous menions la vie chrétienne qui nous convienne, mais celle qui Lui convienne, Lui, celle qu’Il vise pour nous.

V 15 à 30 : le double mariage de Jacob

Le bon accueil que reçut Jacob par Laban à son arrivée ne se démentit pas dans les jours qui suivirent. C’est ainsi que Laban proposa à Jacob de fixer lui-même le salaire qui serait le sien pour son service. Pas question, en effet, sous prétexte que Jacob est de sa parenté, qu’il ne travaille pour son oncle sans être rémunéré. Il ne faut pas longtemps à Jacob pour formuler à Laban ce qui le satisferait. Amoureux depuis le premier jour de la belle Rachel, Jacob proposa à Laban de le servir sept années pleines au terme desquelles il l’épouserait. Laban donna son accord à Jacob, préférant, dit-il, lui donner sa fille plutôt qu’à quelqu’un qui ne serait pas de sa famille.

Tout jusqu’ici semble aller pour Jacob dans le meilleur des mondes. Parti de sa maison pour fuir la colère de son frère qu’il a trompé, il a sur le chemin d’abord fait la rencontre de Dieu qui l’a assuré de Sa protection et de Sa bénédiction. Arrivé chez son oncle, celui-ci le reçoit à bras ouvert, l’accueille et le prend à son service. Et, comme si cela ne suffisait pas, cet oncle bienveillant lui promet au bout de sept années de labeur de lui donner la fille d’une grande beauté dont il est amoureux, Rachel, la cadette de la famille. C’est au sommet de la félicité que Jacob, pour la première fois de sa vie, va connaître sa première déconvenue. La nuit de noces venue, Jacob croit prendre Rachel, la femme avec qui il pense s’être marié. Quelle ne sera pas sa surprise au réveil de constater que celle qui se trouve à côté de lui n’est pas Rachel, mais Léa, la sœur aînée moins belle. Jacob prend ici sa première vraie douche froide et demande des comptes à son oncle. Comment se fait-il que celui-ci l’ait trompé et n’ait pas tenu l’engagement promis ? La réponse de Laban est irréfutable. Oui, Jacob pourra prendre Rachel pour femme. Mais il ne peut le faire avant que sa sœur aînée soit aussi mariée, ce qui serait inadmissible. Comme Jacob a travaillé sept ans pour Léa, il devra travailler sept ans de plus pour Rachel, même s’il peut l’épouser à la fin de la semaine de noces avec Léa.

Jacob entre dans l’école de Dieu. Jusqu’à présent, il a trompé avec brio les autres. Désormais, il devra dans le domaine où il était fort, lutter avec plus fort que lui. Le but de cette lutte est la transformation finale de Jacob. Pour opérer cette transformation, Dieu a mille moyens entre Ses mains. Il choisit ici de travailler au travers des hommes et des circonstances. Jacob est en quelque sorte prisonnier de Laban. Il n’est plus libre de ses mouvements. C’est une école désagréable, mais la seule qui convienne pour le type d’homme qu’il est. Il est peu probable que nous aimions l’école par laquelle Dieu nous fait passer pour que nous parvenions à la sainteté et à la crainte de Son nom. Mais Dieu ne vise pas pour nous ce qui plaît à notre égo et notre nature, mais Il agit en vue du dessein supérieur et éternel qu’Il a pour nous. Il ne nous prive pas de ce qui nous est agréable, et dose la rudesse de l’épreuve. Ainsi, Jacob ne devra pas vivre sept ans de plus sans Rachel, ce qui aurait été cruel pour lui. Mais Il arrange les circonstances de telle manière que la poursuite de ce que nous désirons devienne une école de formation. Aide-moi, ô Dieu, à voir derrière toute déconvenue, Ta main souveraine, paternelle et, malgré tout, bienveillante !

V 31 à 35 : les enfants de Léa

Alors que Jacob ne voyait que Rachel, le Seigneur, dont les dispositions de cœur le portent toujours à la compassion, porta Ses regards sur Léa, la mal aimée. Dépréciée dans le cœur de son mari, Léa bénéficia de la faveur de Dieu qui la rendit féconde pendant que sa sœur aimée de son mari était stérile. Léa donna ainsi successivement à Jacob 4 fils : Ruben, Siméon, Lévi et Juda qui, pour certains, joueront un rôle prépondérant dans le devenir d’Israël. Dieu compensa par Sa bénédiction la souffrance et les blessures que Léa devait connaître dans ses relations naturelles. Le nom qu’elle choisit pour chacun des enfants qu’elle met au monde exprime son vécu tant avec Dieu qu’avec son mari. Ruben traduit la joie qui est la sienne de donner un fils à son mari. Il est le témoignage de sa reconnaissance envers Dieu qui, dit-elle, a vu son affliction. Ruben est aussi pour elle un sujet d’espoir : peut-être, espère-t-elle, que son mari va désormais changer de regard sur elle. N’est-ce pas elle qui lui a donné une descendance par ce fils ? Cet espoir, malheureusement, ne semble pas s’être concrétisé. Aussi, après Ruben, Dieu donna-t-il à Léa Siméon qui, une nouvelle fois, traduit par son nom la reconnaissance de Léa envers Dieu. « Dieu a vu que je n’étais pas aimée et Il m’a entendu. » Après Siméon, Lévi traduit toujours dans le cœur de Léa la même attente : le désir de voir son mari s’attacher à elle. Jacob, certes, ne néglige pas Léa sur le plan du devoir conjugal. Mais celle-ci sent bien que les relations que celui-ci a avec elle ne sont pas l’expression de l’amour, mais du devoir. Comment une femme pourrait-elle être satisfaite de voir son mari coucher avec elle juste par nécessité ? Avec Juda, les sentiments de Léa se sont détachés de sa relation avec Jacob. Elle peut alors pleinement recevoir ce fils comme un cadeau de Dieu et Le louer, Le célébrer pour cela. Léa a dépassé le cap de la souffrance née de la frustration. Aimée de Dieu, elle a pu accepter de ne pas être aussi aimée de son mari qu’elle l’aurait souhaité. Elle peut célébrer Dieu parce que cela lui suffit désormais de se savoir aimé de Lui. Que, comme Léa, notre bonheur entier soit dans la certitude de l’amour dont Dieu nous a témoigné en Christ.  

jeudi 21 juin 2018

GENESE 28


V 1 à 5 : Isaac envoie Jacob chez Laban

Isaac héritier d’Abraham, celui-ci avait pris soin, pour le faire entrer dans cet héritage, d’éloigner de lui tous ceux qui auraient pu lui causer du tort parmi ses frères. C’est l’inverse qui se produira pour Jacob. Héritier spirituel d’Isaac, c’est lui qui devra s’exiler loin du giron familial. La raison en est double. La première tient à la façon dont Jacob s’est approprié la bénédiction de son père. Dans le cas d’Isaac, celle-ci s’est faite dans les règles voulues par Dieu. Nous avons vu de quelle manière cela s’est passé pour Jacob. L’exil de Jacob est la conséquence de son péché, du mensonge qu’il a utilisé, avec la complicité de sa mère, pour tromper son père. La seconde est du ressort de la volonté de Dieu. Dans le giron familial, Jacob, le préféré de sa mère, vivait pratiquement sous son gouvernement. Il est l’heure pour lui d’en être soustrait pour apprendre à connaître Dieu, le Dieu de ses pères, et de laisser façonner par Lui.

La raison humaine du départ de Jacob tient au fait qu’Isaac et Rébecca ne souhaitent pas qu’il prenne femme parmi les Cananéennes. C’est une raison humainement légitime. Ce qui se passe ici dépasse cependant largement le cadre évoqué. Jacob est appelé à être l’héritier spirituel de la bénédiction donnée par Dieu à Abraham. Aussi, c’est avec les termes de celle-ci qu’Isaac bénit Jacob avant de le laisser partir chez Laban, le frère de Rébecca, pour y prendre femme. La bénédiction implique nécessairement que l’exil de Jacob n’est pas définitif puisqu’il est celui qui doit un jour prendre possession du pays où ses pères ont vécu en immigré. Jacob part pour prendre femme, contrairement à Isaac qui était resté dans le pays. C’est lui qui s’exile, alors que ce fut Rébecca qui quitta son pays pour rejoindre son futur époux. L’intention de Dieu est claire. L’heure est venue pour Jacob d’entrer dans la formation spirituelle que Dieu a en vue pour Lui. Il faut que Jacob devienne l’homme de foi que Dieu veut qu’il soit en vue du projet qu’Il a à travers lui pour le salut du monde : une formation qui va couvrir pratiquement le reste du livre de la genèse.

V 6 à 9 : réaction d’Esaü au départ de Jacob

Si la formation des élus de Dieu est le sujet prioritaire que visent les récits qui nous sont rapportés dans la Parole de Dieu, il n’est pas inintéressant pour autant de suivre, d’étudier, d’apprendre de la vie et des choix de ceux qui, disqualifiés, se trouvent à leurs côtés. Esaü, le jumeau de Jacob et son aîné de quelques minutes, en est le type même. Nous l’avons vu : c’est en profanateur, méprisant les privilèges que lui conférait son droit d’aînesse qu’il a commencé sa vie : Genèse 25,29 à 34. Esaü a clairement fait le choix de situer sa vie dans le cadre des avantages et des plaisirs du moment présent, plutôt que de se préoccuper des richesses que Dieu pouvait avoir en réserve pour lui. Il fera le choix, pour son mariage, de suivre l’exemple de Lémek qui, le premier, prit deux épouses : Genèse 4,19. Il les prit de plus, non dans le clan familial d’Abraham, mais parmi les Cananéens : Genèse 26,34. Ayant opté dans sa jeunesse pour une vie selon la chair, tout son développement ultérieur ira dans ce sens. La souveraineté mystérieuse de Dieu, au contrôle de tout ce qui se passe pour chacun, le privera par des moyens peu orthodoxes de la bénédiction prévue pour lui par Isaac, son père, au profit de Jacob, son frère. Abusé pour la seconde fois par son frère, Esaü ne prendra pas acte de la leçon que Dieu voulait lui apprendre, mais réagira à la manière d’un Caïn. Une seule pensée l’habite et l’obsède : se venger en tuant son frère.

Esaü, ici, continue à se conduire selon les mêmes principes. Ayant entendu ce que disait Isaac à Jacob sur les raisons pour lesquelles il l’envoie dans le pays de sa mère, Esaü comprend une fois de plus que le choix qu’il a fait de s’unir à deux cananéennes n’est pas un choix approuvé par ses parents. C’est un coup supplémentaire porté à l’égo d’Esaü en mal de considération. Esaü réagit comme la chair réagit à chaque fois qu’elle se trouve dans cette situation. Au lieu de reconnaître et confesser son erreur, Esaü part chez Ismaël, le demi-frère d’Isaac, pour se trouver dans cette famille une nouvelle épouse. Il revient de son voyage avec Mahalath, la fille d’Ismaël, qu’il ajoute à ses autres femmes. Telle est la façon d’agir de la chair. Animée par l’orgueil, elle ne s’avoue jamais pécheresse. Oui, elle a pu mal agir, mais elle a les moyens en elle-même de réparer ses erreurs. Se faisant, elle ne fait qu’ajouter à Judith et Basmath, Mahalath. Elle ne fait qu’ajouter aux problèmes existants un nouveau problème. Le principe de la chair n’est jamais de capituler. Il est toujours d’essayer de se débrouiller par soi-même pour résoudre les difficultés que ses mauvais choix suscitent. La Parole est là pour témoigner qu’un tel procédé ne paye jamais, mais ne fait qu’embrouiller davantage les choses. Ne suivons pas le chemin d’Esaü ! Laissons-nous plutôt nous laisser enseigner et façonner par Dieu, comme Il va le faire pour Jacob, tout aussi mauvais par nature qu’Esaü. C’est cette voie que nous allons maintenant suivre dans le parcours de formation que va maintenant suivre Jacob.

V 10 à 22 : le rêve de Jacob

Derrière les facteurs humains qui furent la cause de son exil, Jacob va rapidement découvrir qu’en réalité c’est à la décision du Dieu souverain qu’il doit son départ. Aux limites du pays de Canaan, Dieu, en effet, va se révéler à lui dans un songe alors que, seul, il passe sa première nuit loin de sa famille. La visite de Dieu va se traduire de deux manières. La première consiste en une vision devenue célèbre, celle d’une échelle ou d’un escalier reliant le lieu où il se trouve au ciel. Par nature, un escalier est fait pour être utilisé. Il est le moyen habituel par lequel ce qui est en haut peut avoir accès à ce qui est en bas et vice versa. Dans son rêve, Jacob ne voit pas quelque chose ou quelqu’un partir du bas de l’escalier pour le gravir et se rendre en haut. C’est le contraire qui se produit. Il voit les messagers de Dieu monter et descendre l’escalier de manière ininterrompue. Suite à cette vision, Dieu prend la parole. C’est le second volet de la raison de Sa visite auprès de Lui. Comme Il l’a fait pour son père Isaac, Dieu réitère à Jacob la promesse qu’Il a fait en premier à son grand-père Abraham. Il lui confirme que c’est à lui et à ses descendants que le pays qu’il foule de ses pieds appartiendra. Cette descendance que Dieu promet à Jacob ne sera pas petite, mais aussi nombreuse que les grains de poussière de la terre. Elle s’étendra dans les quatre directions de l’horizon et sera pour tous les autres clans de la terre un sujet de bénédiction. Dieu assure enfin à Jacob, face à l’inconnu devant lequel il se trouve, qu’il peut compter sur Sa fidélité. Dieu sera avec lui partout où il ira. Il le gardera et accomplira la promesse qu’Il lui a faite de le ramener sur la terre dont il l’a fait héritier.

C’est alors qu’Il était avec Nathanaël, un israélite authentique qui deviendra l’un de Ses disciples, que Jésus reprit à son compte le contenu de la vision que Dieu donna à Jacob : Jean 1,51. La symbolique de l’escalier reliant le ciel et la terre, sur lequel les anges de Dieu montent et descendent, témoigne à merveille de ce que Jésus est pour nous dans notre relation avec Dieu. Un escalier a pour utilité première de combler un gouffre infranchissable. Un escalier n’est pas un pont. Un pont relie deux parties qui se trouvent sur le même niveau. Un escalier relie deux endroits situés à des hauteurs différentes. Pour se faire, l’escalier doit avoir une partie commune avec chaque endroit. L’escalier doit être accessible pour ceux qui sont en bas sans qu’ils aient besoin de faire d’effort pour y accéder. C’est l’escalier qui descend jusqu’à eux et non eux qui doivent se hisser jusqu’à lui. L’escalier n’est pas plus haut que ceux qui sont en haut. Il part du point le plus élevé et leur donne un moyen de rejoindre ceux qui sont en bas. Un escalier est fait pour être emprunté souvent. Il sert de lien de communication entre deux étages : c’est là sa fonction précise. Telle est aussi la fonction précise du Fils de l’homme, dit Jésus. Si Nathanaël a reconnu en lui le Fils de Dieu : Jean 1,49, c’est sous le titre de Fils de l’homme que Jésus s’identifiera à l’escalier de Jacob : Jean 1,51. En-Haut, Jésus était le Fils de Dieu. Mais parce qu’Il s’est incarné, Il est devenu le Fils de l’homme. A la fois Fils de Dieu et Fils de l’homme, Jésus est le seul qui possède une partie commune avec la Divinité et l’humanité. C’est pourquoi, Il est le seul en capacité de relier les deux mondes. Le but de la venue de Jésus est double. Par Lui, toutes les richesses et les bénédictions du ciel sont apportées d’en-haut à la terre, le monde d’en-bas. Par Lui, aussi tous les besoins, toutes les requêtes des hommes peuvent être véhiculés jusqu’en-haut, dans la présence même de Dieu. C’est pourquoi, Jésus nous invite à nous adresser à Dieu en Son nom ! Ce nom est le seul par qui les humains peuvent avoir une audience directe avec Dieu : Hébreux 9,24. Nul besoin aux humains, pour avoir accès à Jésus, de fournir un effort particulier. C’est Lui, Jésus, qui s’abaisse pour venir jusqu’à nous et se mettre à notre portée d’hommes pécheurs. Le plus bas tombé ne peut être si bas qu’il ne puisse être rejoint par Jésus là où il se trouve. En prenant mon péché sur lui, Jésus s’est identifié à moi. Il s’est mis à ma hauteur, c’est-à-dire au niveau même de la profondeur de la fosse dans laquelle je suis. Que Dieu soit béni pour Jésus, le médiateur parfait qu’Il nous a donné !

Loin de rassurer Jacob, la vision qu’il reçut cette nuit-là l’effraya. Lui qui, jusqu’à ce jour n’avait été l’objet d’aucune révélation de Dieu se trouve soudainement sur une terre sacrée. Bien que préoccupé par la bénédiction de Dieu, Jacob avait toujours jusque là agi selon la malice de son propre cœur pour s’approprier celle-ci. Ici, un travail de Dieu commence à se faire dans sa vie. A cause de la fourberie du cœur de Jacob, ce travail ne pouvait se faire sans que Dieu n’imprime en lui une certaine crainte. La crainte de Dieu, en effet, est et reste pour nous le commencement de l’apprentissage de la sagesse. La réponse de Jacob à la vision reçue sera triple. D’abord, il fait de la pierre sur laquelle il s’est couché un monument qu’il oint d’huile. Ce monument a pour objet d’être pour lui le mémorial de cette rencontre faite avec Dieu. Ces mémoriaux qui parsèment l’histoire biblique ont une valeur didactique. Ils nous invitent nous aussi à nous souvenir des moments cruciaux de notre cheminement avec Dieu. Oui, nous avons vécu des choses précises avec lui et nous ne devons pas les oublier. Nous devons y revenir comme Paul revenait souvent à son expérience première avec Jésus. Pour ma part, je veux aussi me souvenir du jour où, malgré mon péché, Jésus est venu jusqu’à moi, à répondu à ma prière, m’a donné sa joie et m’a envoyé dans le monde pour annoncer Sa Parole. La 2ème chose que fera Jacob est qu’il baptisera d’un nouveau nom le lieu où sa rencontre s’est faite avec Dieu. Appelé autrefois Louz, le lieu va désormais porter le nom de Béthel, c’est-à-dire maison de Dieu. La maison de Dieu est le lieu de Sa demeure. La rencontre que nous faisons avec Dieu n’est pas juste une rencontre avec une Personne, mais avec un royaume. Qui connaît Dieu ne vit plus dans le monde, mais passe des ténèbres à la lumière et du royaume de Satan à celui de Dieu : Actes 26,18. La maison de Dieu n’est pas située dans un lieu précis. Elle se trouve partout où il y a rencontre, contact entre Dieu et un ou quelques hommes : Matthieu 18,20. La dernière chose que Jacob fait est de prendre un engagement, même si, à cette heure, il est conditionnel. Jacob s’engage en promettant à Dieu qu’Il sera véritablement son Dieu si Celui-ci dans son exil L’assure de Sa protection et pourvoit à tous ses besoins. On peut certes porter certaines critiques à la formulation de cet engagement qui met en quelque sorte Dieu en demeure d’être à la hauteur des exigences de Jacob. Il est cependant une promesse que Jacob devra tenir et à laquelle Dieu travaillera pour qu’il la tienne. Les épisodes de la vie de Jacob qui vont suivre jusqu’à sa rencontre finale avec Dieu où il sera brisé seront la façon de Dieu d’amener Jacob à tenir son engagement. Il nous rappelle, pour nous qui sommes dans la même situation que lui, que, quoi que ce soit que nous promettions à Dieu, c’est Dieu qui a le pouvoir de faire en nous ce à quoi nous nous engageons envers Lui. Nous découvrirons alors que le premier obstacle à la réalisation de nos promesses ne se trouve pas autre part qu’en nous-mêmes.

lundi 4 juin 2018

GENESE 27


V 1 à 40 : Jacob usurpe la bénédiction destinée à Esaü

La gloire d’Israël a été de tout temps de se reconnaître comme le peuple du Dieu de ses pères, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. N’est-ce pas en effet avec ces hommes que Dieu a fait une alliance, L’engageant à être leur Dieu et celui de leur postérité à jamais ? On pourrait penser que le fait pour Dieu de consentir à lier l’honneur de Son nom à ces hommes trouve sa raison d’être dans le caractère particulièrement digne de ceux-ci. L’histoire dans laquelle nous entrons et ses suites le démentent de manière radicale. L’alliance que Dieu a contractée avec Abraham, Isaac et Jacob est une alliance de grâce. S’il en fallait des preuves, la façon avec laquelle s’est transmise la bénédiction de Dieu sur Jacob au lieu d’Esaü en est une des plus fortes.

Tout dans le récit de la manière avec laquelle Jacob reçut la bénédiction d’Isaac témoigne du caractère sordide et fourbe de la nature humaine. Si le degré de responsabilité diffère chez chacun, aucun des acteurs de l’histoire n’échappe à la faute.

1.        Isaac :

Isaac, le premier : qu’avait-il besoin, pour donner sa bénédiction à Esaü, son fils aîné, d’exiger de lui qu’il lui prépare un plat fait de gibier comme il l’aimait ? Une bénédiction de Dieu s’achète-t-elle, se mérite-t-elle ? Sa démarche vaut-elle mieux que celle d’Esaü qui, pour un plat de lentilles, a vendu son droit d’aînesse à son frère dans un moment de faiblesse ? Si Isaac n’avait pas cédé à son penchant pour la bonne chère, jamais ce qui s’est passé ne se serait produit. Esaü aurait été béni par son père sur le champ. C’est à lui en premier qu’il se doit d’en vouloir pour la tromperie dont il a été la victime !

2.       Rébecca :

Le péché de Rébecca est celui qui, de loin, paraît le plus grave dans l’histoire. Non seulement, elle échafaude un plan dans lequel elle berne son mari, mais elle y fait entrer le fils qu’elle préfère contre son autre fils. Elle va si loin dans son implication personnelle dans le mensonge qu’elle accepte de prendre sur elle la malédiction qui ne manquera pas de tomber sur son fils si la vérité venait à se faire jour avant que le subterfuge ne fonctionne. Nous verrons par la suite que Rébecca payera au prix fort sa ruse. En attendant, Rébecca se montre un maître d’œuvre avisé, pensant jusqu’au moindre détail le plan qu’elle a conçu pour détourner la main bénissante d’Isaac sur Jacob à la place d’Esaü. Du début à la fin de cette histoire, tout est péché dans la façon d’agir de Rébecca. Elle trompe son mari à qui elle se doit d’être soumise. Elle pratique aux dépens de son fils aîné un favoritisme honteux. Elle agit dans le mensonge et y entraîne avec elle le fils qu’elle dit aimer, ce qui lui vaudra plus tard un bannissement définitif de sa présence. Elle s’active du début à la fin dans son projet mauvais. Elle en est à la fois la conceptrice et la réalisatrice. Elle est prête à en assumer toutes les conséquences néfastes. La laideur du cœur naturel de Rébecca n’a d’égal que sa beauté physique.

3.       Jacob :

En tant que confident de sa mère en vue du projet qu’elle a élaboré, Jacob aurait dû être plein d’indignation. Comment pouvait-il tromper son père et voler son frère de la sorte ? N’aurait-il pas dû, comme son fils Joseph plus tard, être rempli de la crainte de Dieu : Genèse 39,9 ? Si Jacob, malgré ses craintes, adhéra au projet de sa mère, ce n’est dû qu’à une seule chose que Esaü, son frère, dénoncera à juste titre : sa fourberie : v 36. C’est elle qui, la première fois, l’a poussé à saisir l’occasion favorable pour voler à son frère son droit d’aînesse. Il l’a fait alors franchement au vu et au su d’Esaü. Ici, Jacob perd ce scrupule. Il agit, comme le lui suggère sa mère, par derrière, dans le dos de son frère. Jacob, de plus, apportera à deux reprises sa propre part de mensonge à la réussite du stratagème. Alors qu’Isaac s’étonne de voir venir si vite celui qu’il prend pour Esaü, Jacob justifiera cette rapidité en y impliquant la main même de Dieu pour cause première de la réussite de sa chasse : v 20. Puis, plus tard, lorsque son père l’interroge à cause du doute que lui donne la voix qu’il entend et qu’il reconnaît comme celle de Jacob, celui-ci n’hésite pas à mentir ouvertement : oui, dit-il, il est bien Esaü : v 24.

On ne se tient pas longtemps sur le seuil de l’entrée de la fourberie. Bientôt on entre dans la maison et on ferme la porte derrière soi pour que ce que nous tramons ne soit ni vu ni connu de personne. Il est rare, quand l’on a commencé à mentir et que le résultat en a été un succès, que l’on s’arrête en si bon chemin. Donner le petit doigt au mensonge, c’est finir par lui livrer tout son être. L’effet le plus pervers du mensonge n’est pas encore la tromperie qu’il représente à l’égard d’autrui. Il est, dans celui qui ment, l’engrenage dans lequel il se trouve entraîner qui conduit inexorablement à l’étouffement de la conscience.  La conscience, par les scrupules qu’elle suscite, joue le rôle d’un garde-fou nous protégeant de nous-mêmes. Le premier but du mensonge, lorsqu’il pénètre dans l’âme, est de renverser les barrières érigées par la conscience pour arriver à ses fins. Ce travail de sape du mensonge est particulièrement visible chez Jacob. Après Esaü, c’est Isaac, son père, que Jacob n’hésite pas à tromper, jetant par-dessus bord le respect qu’il lui devait. Puis, après Isaac, c’est Dieu Lui-même, qui est pris comme caution du mensonge de Jacob. On atteint ici le sommet de la fourberie qui est le sacrilège, la profanation volontaire de la vérité et de la sainteté du nom de Dieu. Heureusement pour Jacob, Dieu se montrera plus grand que son cœur. Il faudra cependant un travail en lui qui durera toute sa vie pour en arracher la plante malfaisante de la duplicité.

4.       Esaü

Pour une fois, il apparaît ici comme la victime totale du complot ourdi par sa mère et son frère. Quelque part, Esaü paye le choix qu’il a fait plus jeune de mépriser les avantages spirituels que lui donnait son droit d’aînesse. Sa repentance et ses larmes tardives ne purent rien y changer : Hébreux 12,17. On ne se moque pas de Dieu. Tôt ou tard, chacun de nous moissonne dans sa vie ce qu’il a semé : Galates 6,7.

Le récit que nous lisons évoque le côté humain de l’histoire, son recto. Derrière, il y a la main mystérieuse de Dieu qui agit, contrôle et fait aboutir les choses dans le sens de Son projet. Chaque acteur est responsable de sa façon d’agir et en sera redevable à Dieu. Dieu a cependant le pouvoir de tirer du plus grand des maux un bien. Même les machinations des hommes n’échappent pas au contrôle de Sa souveraineté parfaite. À tout moment, en effet, le plan conçu par Rébecca aurait pu capoter à sa confusion la plus totale. Mais Dieu a laissé faire. Mieux, il a contrôlé les circonstances de manière à ce qu’Isaac ait le temps de manger le repas préparé par Jacob pour le bénir avant qu’Esaü ne rentre de la chasse et n’apprête son gibier. Ici aussi, l’homme forme des projets, mais c’est la volonté de Dieu qui se réalise : Proverbes 19,21.

Pensant bénir Esaü, Isaac ouvrit les écluses des cieux pour que soit déversé sur Jacob tous l’abondance des privilèges dus à la primauté de la faveur de Dieu. Isaac demanda pour son fils trois bénédictions qui, à elles seules, recouvraient tout le champ de sa vie et de sa position. La première touchait au domaine agricole. Isaac demanda pour Jacob qu’il soit au bénéfice de la rosée du ciel et des ressources de la terre en vue de récoltes abondantes. La seconde s’appliquait au domaine de sa liberté et de sa souveraineté. Isaac exprima le vœu que des peuples et des nations lui soient assujettis et se prosternent devant lui, que Jacob soit mis au large en occupant, par la faveur de Dieu, une position d’autorité dans le monde. La dernière concernait le domaine de sa relation avec ses frères, les fils de sa mère (il s’agit ici de la descendance d’Esaü). Ici aussi, Isaac demanda à Dieu que Jacob occupe une position de primauté reconnue par ses frères. Isaac ferma la boucle de la bénédiction en demandant à Dieu ce qu’Il avait Lui-même ordonné pour Abraham : que celui qui maudisse Jacob soit maudit et que celui qui le bénit soit béni. Après cela, que pouvait encore recevoir Esaü qui ne touche à un domaine couvert par la bénédiction de Dieu pour Jacob ?

Face à la détresse d’Esaü, qui se voit spolié pour la seconde fois par son frère Jacob, Isaac ne peut, en guise de bénédiction, que lui proposer une issue de secours. Même si elle était destinée à Esaü, il est impossible à Isaac d’annuler les termes de la bénédiction qu’a reçue Jacob. La bénédiction est en quelque sorte une entité objective, séparée de celui qui en est le bénéficiaire. Ce qui a été dit et prononcé au nom de Dieu à Jacob sera pour Jacob, même si, dans l’esprit d’Isaac, cela était destinée à Esaü. Isaac confirme donc à Esaü la bénédiction qu’a reçue Jacob, mais il y ajoute une clause de salut pour lui. Tant qu’Esaü vivra sous la juridiction de Jacob, il lui sera soumis. Le seul moyen de se libérer de son joug sera pour lui de se soustraire à cette juridiction en prenant sa liberté pour vivre dans l’errance. Triste conclusion d’un épisode que Dieu seul sera capable de dénouer pour le bien de tous !

V 41 à 48 : Départ de Jacob chez son oncle Laban

Si Rébecca et Jacob sont arrivés par la tromperie à leurs fins en usurpant la bénédiction destinée à Esaü, ce n’est que maintenant qu’ils vont récolter le fruit de leur manigance. Certes, Jacob a reçu la meilleure part de la bénédiction de son père, mais il a aussi fait naître dans le cœur de son frère une profonde aversion à son égard. Dès lors, Esaü ne cache plus le dessein qui est dans son cœur. Tant que son père Isaac vit, il ne fera rien à son frère. Mais Isaac est âgé, il n’en a plus pour longtemps. Dès qu’il mourra, c’en sera fini de Jacob aussi.

Une fois de plus, c’est à l’initiative de Rébecca que Jacob devra ce qui va se produire pour lui dans l’avenir. Consciente du caractère résolu du projet meurtrier d’Esaü, elle va convaincre Isaac de laisser partir Jacob chez son frère Laban pour se trouver une femme. Le prétexte énoncé est que Rébecca ne veut pas que Jacob imite son frère Esaü en prenant une épouse parmi les filles hittites. L’argument fait mouche chez Isaac qui souffre de cette alliance incongrue de son fils aîné avec ces femmes païennes : Genèse 26,34. Dans l’esprit de Rébecca, cet éloignement ne sera que pour un court temps. Elle va devoir apprendre ici qu’elle ne peut tout décider et contrôler et que c’est à Dieu qu’appartient la souveraineté sur chaque vie.

GENESE 33

V 1 à 16  : rencontre avec Esaü Après son combat décisif contre l’Eternel d’où il sortit blessé, Jacob vit arriver face à lui Esaü acc...