jeudi 15 mars 2018

GENESE 20


Malgré la déconvenue vécue en Egypte à cause du mensonge dont Abraham se rendit coupable à propos de Sara (Genèse 12,10 à 20), le patriarche n’en tira, semble-t-il, aucune leçon. S’implantant à Guérar, sur le territoire d’Abimélek, Abraham et Sara adoptent le même comportement. S’imaginant qu’il n’y a ici aucune crainte de Dieu, voulant se prévenir d’un danger qui n’existe que dans leur imagination, le couple, au lieu de faire confiance à Dieu en vertu de toutes les promesses qu’il a reçues, a recours aux mêmes procédés pour assurer sa sécurité. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Dieu les laisse vivre pour la seconde fois la même expérience honteuse. Abimélek, croyant Sara libre, la fait prendre pour l’ajouter à son harem. Si ce n’est la grâce de Dieu qui agit souverainement en leur faveur, tout le dessein de Dieu aurait pu ici être tenu en échec à cause de leur incrédulité.

Nous pouvons nous étonner de voir, après tant d’années, Abraham chuter comme dans les premiers jours de sa vie de foi. Si nous examinons nos vies, cet étonnement disparaîtra assez vite. Après des décennies de vie chrétienne, ne nous arrive-t-il pas de commettre encore les mêmes fautes qu’à ses débuts ? Nos péchés de jeunesse sont-ils si loin de nous qu’ils ne représentent plus pour nous encore des occasions de chute ? S’il nous fallait une preuve que, malgré toutes les années de vie avec Dieu, notre chair n’a changé en rien et ne s’est aucunement améliorée, nous l’avons ici. Il y a une illusion sur la question de la croissance et de la maturité chrétiennes à laquelle il faut tordre le cou. Nous ne nions point le fait que, par les épreuves par lesquelles Il nous fait passer, Dieu nous fasse progresser dans la foi. Ainsi nous amène-t-Il par l’expérience de plus en plus à ne nous reposer que sur Lui seul, sans trouver d’autre appui que sa fidélité à Ses promesses. Pour autant, cela ne signifiera jamais que, ayant progressé de cette manière, nous ayons changé dans notre nature première. Celle-ci reste après des décennies toujours la même, orientée de la même manière. Livrée à elle-même, déconnectée de Dieu, elle suit toujours les mêmes chemins, glisse toujours sur les mêmes pentes, a recours toujours aux mêmes procédés quand il s’agit pour elle d’assurer sa propre sécurité. C’est en Christ que nous sommes des êtres nouveaux. Pour ce qui est de nous, de notre chair, nous sommes toujours les mêmes pécheurs incrédules et mauvais.

De l’intercession d’Abraham pour Sodome et du salut de Loth de la destruction de la ville impie, nous apprenons une leçon essentielle sur Dieu : c’est que Dieu ne met pas sur le même rang le juste et le méchant. Cette distinction dans le jugement de Dieu a été la base de toute l’argumentation du patriarche dans sa prière et la cause première du salut de son neveu. Fidèle à Lui-même, Dieu va agir ici une nouvelle fois en fonction de cette qualité. Il le fera à la fois pour Abraham et Sara, mais aussi envers Abimélek qui, trompé sur l’identité de Sara, l’a mise à part pour lui sans savoir qu’elle était mariée.

C’est la nuit, alors qu’il dort, qu’Abimélek va recevoir en rêve la visite de Dieu. Le sommeil dans lequel Abimélek se trouve, croit-il, est le sommeil du juste. Ayant pris Sara, Abimélek s’est endormi en paix, sans mauvaise conscience. Il n’a juste exercé à son encontre que le droit du prince. Dieu, qui sait la vérité sur l’identité de Sara, n’en juge pas de la même manière. Ils ne sont ainsi pas rares les moments où, persuadé de n’avoir rien fait de mal, nous nous endormons avec bonne conscience… jusqu’à ce que Dieu nous réveille en nous faisant voir la nature de nos actes sous un autre jour. Si la justice de Dieu est à craindre, nous pouvons aussi Le louer pour la protection qu’elle représente pour celui qui est droit de cœur. Oui, Abimélek a péché. Mais, comme il a agi dans l’ignorance, Dieu fait la part des choses. Il deviendra réellement coupable à partir du moment où il aura vu son acte sous son vrai jour, pas avant. Aussi, Dieu, dans Sa justice, prend-Il soin de Lui révéler la vérité à ce sujet dans le but, non de le condamner, mais de le conduire à la repentance. Cette repentance était nécessaire pour éviter à Abimélek le jugement. Mais elle ne pouvait se faire sans qu’il ne comprenne, de la part de Dieu, en quoi il avait péché. Convaincu de péché, saisi de crainte par la sentence qui pèse sur lui, Abimélek plaide sa cause auprès de Dieu et sa bonne foi. Il utilise pour son propre salut contre Abraham le même argument qu’Abraham a utilisé pour celui de la ville de Sodome pour la sauver : Dieu peut-il faire périr un juste comme Il le ferait pour un méchant ? Dieu entend et cautionne la prière d’Abimélek. Admirons ici de nouveau le mystère de la grâce de Dieu qui utilise le péché d’un homme de Dieu comme occasion pour se révéler à un roi païen. Mis en demeure de rendre à Abraham sa femme, Abimélek n’attendra pas un jour de plus. Debout de bon matin, il réunit tout son clan pour témoigner de ce qu’il a vécu pendant la nuit. La même crainte saisira tous ceux qui entendront son récit. Après que Dieu ait demandé des comptes à Abimélek sur ses actes envers Abraham et Sara, c’est à lui d’en demander maintenant au patriarche.

L’indignation dont fait preuve Abimélek à l’égard d’Abraham est à la hauteur de la déception dont celui-ci a été la cause par sa dissimulation au sujet de sa femme. Le roi de Guérar ne prend pas de gant pour dire au patriarche ce qu’il ressent. La façon dont il s’est conduit envers lui est inadmissible. En exposant Abimélek au risque de mal agir sans qu’il le sache, il lui a tendu un piège. Il a agi envers lui d’une manière qui ne se fait pas à l’égard du respect et des convenances sociales. Abimélek, cependant, ne veut pas s’arrêter à la façon d’agir d’Abraham. Tout comportement est le fruit d’une intention ou d’une motivation. C’est celle-ci que le roi de Guérar veut connaître.

Abraham ne cache rien de la pensée qui fut à la base de sa conduite. Une fois de plus, celle-ci est due à un préjugé négatif, une fausse appréciation de la mentalité dans laquelle devaient vivre les habitants du lieu où il s’était rendu. Abraham s’était dit que, certainement, il ne devait y avoir aucune crainte de Dieu parmi eux et que ceux-ci n’hésiteraient pas à le tuer pour lui prendre sa femme. La leçon d’Egypte sur le caractère aléatoire des suppositions et des jugements tout faits n’aura pas servi à Abraham. Une fois de plus, en écoutant ses craintes et ses pensées, Abraham a échoué sur le plan de la foi. Il avait pourtant reçu de Dieu des garanties plus fortes au sujet de Sara qu’au temps où il manqua en Egypte. Dieu ne venait-il pas de lui dire que c’est par Sara que le fils qu’Il lui a promis devait naître ? Comment pouvait-il penser après cela que quelque chose pouvait arriver à sa vie ou celle de Sara ?

Si, dans un premier temps, Abraham dit la vérité, il cherche à atténuer dans un second temps le caractère mensonger de ce qu’il a fait croire au sujet de Sara à Abimélek. Sara n’est pas sa sœur, mais sa demi-sœur, fille de son père, mais non de sa mère. Ce n’est pas par un mensonge, mais par une demi-vérité qu’Abraham a trompé Abimélek. C’est là sans doute, une fois de plus, ce qu’Abraham se disait pour calmer sa conscience. Une fois de plus, Abraham va en prendre pour son grade par la réaction d’Abimélek. Indigné, celui-ci aurait pu, comme le Pharaon, le renvoyer de ses terres. Il n’en fera rien. Passant au-dessus de la faiblesse du patriarche, non seulement il l’invite à rester dans son pays et le gratifie de multiples bienfaits (petit et gros bétail, serviteurs et servantes), mais il lui offre de plus un gage pour couvrir sa faute et relever l’honneur de Sara. Alors qu’Abraham pensait qu’il n’y avait pas de crainte de Dieu dans ce lieu, il va découvrir qu’il y a chez Abimélek une connaissance de la grâce qui dépasse la sienne.

Apprenons une fois pour toutes à faire confiance à Dieu dans toutes les situations inconnues qui se présentent à nous. Là où Dieu nous conduit, Il nous précède. Sa promesse d’être avec nous est certaine. Appuyons-nous sur elle plus que sur nos craintes, nos doutes, les impressions que la vue des choses voudrait nous donner. Ce qui est réel est ce que Dieu dit, non ce que nous voyons ou pressentons.

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